L'administration d'une copropriété est loin d'être une sinécure aujourd'hui, contrairement à ce qu'elle a pu être quelques décennies auparavant.
Exigeant des compétences dans de multiples domaines1, le soin en est le plus souvent confié aux professionnels, les syndics.
Professionnel, comme tout autre, le syndic engage sa responsabilité, y compris au cas... d'inaction fautive. Et ce même longtemps après avoir quitté ses fonctions !
Sous réserve d'avoir été mandaté à cet effet, le syndic peut être amené à gérer les travaux en copropriété et, notamment, les gros travaux.
Outre les aspects concernant la conclusion des marchés de travaux et la mise en œuvre2, le syndic est alors chargé de la surveillance des travaux3 et de la réception de ces derniers en fin de chantier. Il a également la charge de la conservation du bien commun.
Tel est le cas des travaux de réfection de toiture. Or les travaux de bâtiment sont fréquemment frappés de désordres et malfaçons impliquant la mise en oeuvre des garanties et actions nécessaires de la part du syndic.
De telles garanties et actions sont enfermées dans des délais de rigueur, notamment la bien connue garantie décennale et, comme le disait Jules Jouy, « après l'heure, c'est plus l'heure »
Ce qu'un syndic, pourtant professionnel avéré, s'est vu rappeler à ses dépens.
Des travaux de réfection de toiture frappés de malfaçons
Une copropriété décide de procéder à des travaux de réfection de toiture dont la réception a lieu sans réserve (aucune malfaçon apparente).
Deux ans plus tard apparaissent des infiltrations suivies de dégradations diverses affectant des bois de lucarnes (pourrissement), notamment. Une deuxième infiltration survient sept ans plus tard, soit plus de 9 ans après les travaux.
Bien qu'ayant déclaré aux copropriétaires que le nécessaire était fait pour remédier, le syndic n'avait procédé à aucune démarche4
Il faudra encore attendre 4 ans pour que le syndic engage une procédure, malheureusement tardive, de référé expertise contre l'architecte.
Une situation très mal vécue par les copropriétaires (et occupants), bien évidemment, au point de conduire 2 ans plus tard à la révocation du syndic manifestement peu diligent.
Sept ans passent encore et le syndicat, en la personne du nouveau syndic, agit en responsabilité à l'encontre du précédent, soit 23 ans après les travaux.
L'inaction fautive du syndic
L'expertise judiciaire, diligentée dans le cadre de l'action en responsabilité, confirme que la totalité des désordres provient de malfaçons et de travaux non conformes aux règles de l'art.
Cette expertise confirme également l'absence de diligences du premier syndic, excepté la seule action en référé contre l'architecte d'ailleurs hors délai, et donc l'inaction fautive de la part de ce professionnel.
Condamné au fond, ce dernier avait formé un pourvoi qui est rejeté par la Cour de cassation5, avec confirmation du préjudice subi par le syndicat à hauteur de 40 000 €.
Il est à noter que l'action au fond du syndicat a pu être engagée sept ans après son éviction en raison de la prescription applicable à l'époque, soit 10 ans. Actuellement et depuis la loi ELAN n° 2018-1021 du 23 novembre 2018, le délai de prescription de l'action à l'encontre du syndic est le délai de droit commun, soit 5 ans.
[1] Droit, comptabilité, finance, assurances et sinistres, bâtiment, gestion du personnel, etc.
[2] Sollicitation des entreprises et devis, analyse des devis, validation (AG ou Conseil syndical),
[3] Organisation de l'exécution au regard des lieux et de l'occupation (calendrier, sécurité, etc.).
[4] D'abord les déclarations de sinistre (assureurs du syndicat, de l'architecte et de l'entreprise) avec mise en oeuvre des garanties et, si nécessaire, référé expertise.
[5] Cour de cassation, 4 septembre 2025 Troisième chambre civile Pourvoi n° 23-19.675